La commission arbitrale ne peut être saisie directement par un salarié ou une entreprise. Le journaliste doit passer par l’intermédiaire d’un syndicat de journalistes de son choix. Pour saisir la commission, le SNJ vous demande :
1. une lettre indiquant qu’il est choisi comme organisation de salariés pour nommer des arbitres ;
2. vos nom et adresse ;
3. les nom et adresse de l’entreprise ;
4. les coordonnées de votre avocat (si vous en avez un, ce qui n’est pas obligatoire) ;
5. le motif de la rupture du contrat de travail avec copie de la lettre de licenciement ou de celle par laquelle vous faites jouer la clause de conscience, la clause de cession ou la clause de cessation (article L. 761-7 du Code du travail) ;
6. si vous la connaissez, l’organisation patronale à laquelle adhère votre ex-employeur.
Ainsi officiellement saisi, le SNJ transmet la demande à la commission et désigne deux arbitres. L’organisation patronale concernée désignera à son tour ses deux arbitres.
Arbitres salariés et patrons devront se mettre d’accord sur le choix d’un haut magistrat pour présider la Commission. Comme devant le conseil de Prud’hommes, le salarié et le chef d’entreprise peuvent se présenter seuls ou se faire accompagner par un avocat qui les assistera.
Contrairement aux Prud’hommes, la Commission arbitrale n’est pas gratuite ; ni le ministère du Travail ni celui de la Justice ne lui ayant alloué de budget de fonctionnement. La contribution aux frais s’établit à l’heure actuelle à 370 € pour chacune des parties (journaliste et employeur). Cette contribution est destinée à la rémunération du magistrat et aux frais de fonctionnement de la Commission.
Les arbitres, eux, sont bénévoles. Toutefois, la multiplication des saisines et la charge qu’elle entraîne sur ses services administratifs, ont contraint le SNJ à demander, depuis le 1er janvier 2020, une participation de 400 € aux frais de dossier pour les non-adhérents et de 100 € pour les adhérents. Les adhérents et non-adhérents sont exonérés de cette participation en cas de faute.
« Automatique » dans son calcul jusque 15 ans d’ancienneté, elle est librement appréciée par la Commission au-delà. Dans ce cas, il arrive souvent que le demandeur perçoive l’indemnité correspondant aux 15 premières années de collaboration avant son passage devant la Commission. Il s’agit alors d’une provision sur l’indemnité totale à venir. Il conviendra donc de chiffrer cette indemnité totale demandée en indiquant le mode de calcul, et d’en retrancher la provision déjà versée.
Lors de la saisine, le SNJ propose à la partie patronale un nom de président. A ce stade, déjà, une première difficulté peut survenir : si l’entreprise n’adhère à aucune organisation patronale, les arbitres patronaux ne seront pas nommés. Il conviendra alors de faire nommer ces arbitres par le Tribunal de Grande Instance après une mise en demeure de l’entreprise, prévue à l’article L. 761-5 du Code du Travail. Idem si les deux parties n’arrivent pas à se mettre d’accord sur le choix du président.
Cette partie de mise en place de la Commission peut parfois être très longue, le « jeu » de la plupart des organisations d’employeurs consistant à traîner pour nommer les arbitres et, ensuite, à contre-proposer des noms de président à l’infini.
Elle est à la fois écrite et orale.
Procédure écrite car le journaliste doit déposer un mémoire en demande indiquant les raisons qui l’ont conduit à saisir la Commission (en matière de faute alléguée, il conviendra de « démonter » les motifs de licenciement invoqués par l’employeur) et chiffrant l’indemnité de licenciement demandée. L’employeur devra, quant à lui, donner un « mémoire en réponse ».
Procédure orale car les parties sont expressément convoquées lors de l’audience et doivent présenter leur dossier ou le faire présenter par leur avocat.
Au SNJ, nous conseillons toujours au journaliste d’être physiquement présent, même s’il a pris un avocat Des questions peuvent bien sûr lui être posées par les arbitres ou par le président.
Le journaliste est convoqué à l’audience par le secrétariat de la Commission et doit s’y rendre, comme pour n’importe quelle juridiction. Il y a d’abord une séance plénière réunissant les quatre arbitres, le président, le demandeur (et son avocat le cas échéant), l’employeur ou son représentant (et son avocat le cas échéant). Les parties exposent leurs prétentions et peuvent être interrogées par les arbitres et le président.
Ensuite, le journaliste et l’employeur se retirent, les quatre arbitres et le président délibèrent. La décision est prise le jour même (sauf exceptions rarissimes). Il appartient au président de rédiger la « sentence » (ce qu’il fait dans un délai variable selon le président) ; le secrétariat de la Commission fait ensuite « tourner » cette sentence auprès des arbitres afin qu’elle soit signée. Lorsque toutes les parties et le président ont signé, la sentence est déposée au greffe du Tribunal de Grande Instance. Jusque-là, cette sentence ne doit pas être rendue publique. Elle est alors immédiatement exécutoire.
NB –
1. Des intérêts de droit courent à partir du moment où la partie patronale est prévenue de la saisine de la Commission mais il faut en faire la demande explicitement dans le mémoire.
2. Le journaliste peut également demander une certaine somme pour les frais exposés (avocat, frais de procédure) au titre de l’article 700 du NCPC (Nouveau code de procédure civile).
Instituée à l’article L. 761-5 du Code du Travail (L. 7112-4 recod.), la Commission arbitrale des journalistes :
1. juge du droit à indemnités de licenciement lorsqu’une faute a été alléguée par l’employeur et ce quelle que soit l’ancienneté du journaliste professionnel dans l’entreprise ;
2. apprécie le montant des indemnités de licenciement après plus de 15 années d’ancienneté dans l’entreprise et, dans ce cas, quel que soit le motif de la rupture du contrat de travail.
Avec la Commission arbitrale, la loi reconnaît aux journalistes le privilège d’être jugés par leurs pairs. Privilège parce qu’il est plus facile de détailler la tâche d’un rédacteur graphiste à des professionnels de la presse qu’à un conseiller prud’homal qui ignore tout de la fonction. Privilège que de pouvoir faire peser une large tranche de vie par des arbitres qui ont partagé la même expérience.
Privilège enfin parce que la Commission arbitrale rend des sentences contre lesquelles on ne peut pratiquement pas faire appel (sauf un appel en annulation si la Commission a outrepassé sa compétence, risque qui peut conduire, dans certains cas, la Commission à surseoir à statuer). Qui conteste sa sentence ne peut le faire que devant la cour de Cassation. Rares sont les patrons qui s’y risquent.
Après une courte parenthèse de sa naissance, en 1935, jusqu’à 1940, rue du Coq Héron à Paris, à côté du SNJ et de la Commission de la carte, la Commission arbitrale a longtemps tenu ses réunions au siège des organisations patronales.
Cette entrave prolongée à l’indépendance de la Commission a amené le SNJ à impulser plusieurs initiatives pour obtenir un lieu de réunion neutre et des moyens de fonctionnement (secrétariat, archivage). La Commission de la carte (221 rue Lafayette, 75010 Paris) a finalement été retenue pour abriter secrétariat et réunions à partir de juillet 1992.
Attention : la compétence de la Commission est strictement limitée à l’indemnité de licenciement. Elle n’est pas juge du contrat de travail et toute contestation portant, par exemple, sur le salaire de référence, sur l’ancienneté ou sur la qualité de journaliste professionnel oblige les parties à faire d’abord trancher le litige par le conseil de Prud’hommes. Elle n’est compétente ni pour accorder le préavis, ni pour allouer des dommages et intérêts.